10 poèmes incontournables de Cecília Meireles analysés et commentés

10 poèmes incontournables de Cecília Meireles analysés et commentés
Patrick Gray

La carioca Cecília Meireles (1901-1964), auteur d'une poésie intense, intime et viscérale, est sans doute l'un des plus grands écrivains de la littérature brésilienne.

Ses poèmes, extrêmement musicaux, ne s'inscrivent dans aucun mouvement littéraire spécifique, bien que la plupart des critiques la considèrent comme appartenant à la deuxième génération du modernisme brésilien. Parmi ses thèmes les plus fréquents figurent l'isolement, la solitude, le passage du temps, le caractère éphémère de la vie, l'identité, l'abandon et la perte.

Les mots de Cecília ont enchanté des générations et resteront dans les mémoires.

1. Motif

Je chante parce que l'instant existe

et ma vie est complète.

Je ne suis ni heureux ni triste :

Je suis poète.

Frère des choses insaisissables,

Je ne ressens ni joie ni tourment.

Je passe des nuits et des jours

dans le vent.

Si je m'écroule ou si je construis,

que je reste ou que je m'effondre,

- Je ne sais pas, je ne sais pas, je ne sais pas si je vais rester...

ou d'un pas.

Je sais que je chante, et la chanson est tout.

L'aile rythmique a un sang éternel.

Et un jour, je sais que je serai muet :

- rien d'autre.

Motif est le premier poème du livre Voyage La composition est un métapoème, c'est-à-dire un texte qui tourne autour de son propre processus de construction. Le métalangage dans la poésie est relativement fréquent dans la poésie de Cecília Meireles.

Concernant le titre, Motif Il faut dire que pour Cecília, écrire et vivre sont des verbes qui se confondent : vivre, c'est être poète, et être poète, c'est vivre.

L'écriture fait partie de son identité et constitue une condition essentielle de sa vie, comme en témoigne notamment le vers : "Je ne suis ni heureux ni triste : je suis poète".

Le poème est existentialiste et traite du caractère éphémère de la vie, souvent avec un certain degré de mélancolie, malgré son extrême délicatesse. Les vers sont construits à partir d'antithèses, d'idées opposées (heureux et triste ; nuits et jours ; je m'écroule et je bâtis ; je reste et je m'écroule ; je reste et je passe).

Un autre trait marquant est la musicalité de l'écriture - le texte contient des rimes, mais pas avec la rigueur de la métrique comme dans le parnassianisme (exister et triste ; fugidias et jours ; je bâtis et reste ; tout et muet).

Il faut également souligner que pratiquement tous les verbes du poème sont au présent de l'indicatif, ce qui montre que Cécile a voulu évoquer l'ici et le maintenant.

2. Soit ceci, soit cela

Ou bien il pleut et il n'y a pas de soleil,

ou si vous avez du soleil et pas de pluie !

Ou bien vous mettez le gant et ne mettez pas la bague,

ou vous mettez la bague et ne mettez pas le gant !

Celui qui monte dans les airs ne reste pas au sol,

celui qui reste au sol ne s'élève pas dans les airs.

Il est dommage que l'on ne puisse pas

d'être aux deux endroits en même temps !

Ou bien je garde l'argent et je n'achète pas les bonbons,

ou j'achète les bonbons et je dépense l'argent.

Soit ceci, soit cela : soit ceci, soit cela...

et je choisis toute la journée !

Je ne sais pas si je joue, je ne sais pas si j'étudie,

si je cours ou si je reste calme.

Mais je ne comprends toujours pas

ce qui est mieux : ceci ou cela.

Soit ceci, soit cela est un exemple de poésie destinée aux enfants (il convient de rappeler que Cecília était institutrice et qu'elle connaissait donc très bien l'univers des enfants).

Ce poème est si important qu'il a donné son nom au livre qui rassemble 57 poèmes. Lancé en 1964, l'ouvrage Soit ceci, soit cela est un classique qui a traversé les générations.

Dans les vers du poème, on retrouve la question du doute, de l'incertitude, le I-lyrique s'identifie à la condition indécise de l'enfant. Le poème enseigne l'impératif du choix : choisir c'est toujours perdre, avoir une chose signifie nécessairement ne pas pouvoir en avoir une autre.

Les exemples quotidiens, pratiques et illustratifs (comme celui de la bague et du gant) servent à enseigner une leçon essentielle pour le reste de la vie : il est malheureusement souvent nécessaire de sacrifier une chose au profit d'une autre.

Cecília joue avec les mots de manière ludique et naturelle et cherche à se rapprocher le plus possible de l'univers de l'enfance.

Lire l'analyse complète dans l'article Analyse du poème Ou isto ou aquilo de Cecília Meireles.

3. Adieu

Pour moi, pour toi et pour d'autres encore.

qui est là où les autres choses ne sont jamais,

Je laisse la mer agitée et le ciel calme :

Je veux de la solitude.

Voir également: Tableau La naissance de Vénus de Sandro Botticelli (analyse et caractéristiques)

Mon chemin est sans repères ni paysages.

Et comment le connaissez-vous ? me demandera-t-on.

- Pour ne pas avoir de mots, pour ne pas avoir d'images.

Pas d'ennemi ni de frère.

Que cherchez-vous ? Tout. Que voulez-vous ? Rien.

Je voyage seul avec mon cœur.

Je ne suis pas perdu, mais je suis désorienté.

Je prends mon cours en main.

Le souvenir s'est envolé de mon front.

S'envolent mon amour, mon imagination...

Peut-être que je mourrai avant l'horizon.

La mémoire, l'amour et le reste, où seront-ils ?

Je laisse mon corps ici, entre le soleil et la terre.

(Je t'embrasse, mon corps, toute désillusion !

Triste bannière d'une guerre étrange...)

Je veux de la solitude.

Adieu est présent dans le livre Fleur de poèmes Nous voyons clairement dans les vers la recherche de solitude du locuteur du poème. Cette recherche de solitude est un chemin, une partie d'un processus.

Le sentiment de solitude est une paraphrase de la volonté de mourir, qui sera exprimée à la fin des vers lorsque le moi lyrique déclare "Je laisse mon corps ici, entre le soleil et la terre".

La construction du poème est basée sur le dialogue, avec des questions et des réponses et un interlocuteur supposé de l'autre côté avec lequel la communication est établie. Une question qui plane est de savoir à qui exactement le moi lyrique s'adresse. Dans la sixième strophe, nous voyons par exemple la question suivante : "Et comment le connais-tu ? tu me le demanderas". Qui pose la question ? Le doute plane dans l'air.

Adieu est une création marquée par l'individualité, comme en témoigne l'utilisation exhaustive de verbes à la première personne ("quero", "deixo", "viajo", "ando", "levo"). Ce sentiment d'individualisme est renforcé par l'utilisation du pronom possessif "mon", qui est répété tout au long du poème.

Écouter le poème Adieu récité par Diandra Ferreira :

Diandra Ferreira

4. Portrait

Je n'ai pas eu ce visage aujourd'hui,

Si calme, si triste, si mince,

Ni ces yeux si vides,

Ni la lèvre amère.

Je n'avais pas ces mains impuissantes,

Si immobile, si froid et si mort ;

Je n'avais pas ce cœur

Qui ne se montre même pas.

Je n'ai pas remarqué ce changement,

Si simple, si juste, si facile :

- Dans quel miroir s'est-elle perdue ?

mon visage ?

Le titre du poème ( Portrait Les vers font référence à la fois à l'apparence physique (les traits du visage et du corps) et à l'angoisse existentielle intérieure, motivée par la notion de temps qui passe.

On retrouve tout au long des vers les sentiments de mélancolie, d'angoisse et de solitude qui caractérisent déjà la poétique de Cecilia, ainsi que la tristesse manifestée par la prise de conscience tardive du caractère éphémère de la vie ("je n'ai pas remarqué ce changement").

La vieillesse est également constatée par la dégénérescence du corps. L'I-lyrique se regarde lui-même, dans ses aspects internes et externes. Le mouvement présenté dans les vers accompagne le passage des jours, dans le sens de la vie à la mort (la main qui perd de sa force, devient froide et morte).

Le dernier couplet, très puissant, synthétise une profonde réflexion existentielle : où s'est perdue l'essence de l'eu-lyricus ?

Portrait est l'un des poèmes les plus célèbres de Cecilia et est récité en ligne :

Portrait - Cecilia Meireles

Essayez de consulter l'article Analyse du poème Portrait, par Cecília Meireles.

5. Commander à

Je voudrais une photo

comme ceci - vous voyez - comme ceci :

dans lequel j'ai ri pour toujours

Voir également: Signification de l'expression "Connais-toi toi-même

comme une robe de soirée éternelle.

La noirceur de mon front,

J'ai fait la lumière sur mon front.

Que cette ride, qui me prête

un certain air de sagesse.

Ne pas cibler les fonds forestiers

ni de fantaisie arbitraire...

Non... dans l'espace restant,

placer une chaise vide.

Inséré dans le livre Vacancy Music (1942), le poème est basé sur une expérience profondément biographique. C'est un poème centré sur lui-même : il parle de la douleur, de l'angoisse et des peurs du moi lyrique.

Chez l'I-lyriciste, qui a fait une plongée à l'intérieur de lui-même, nous lisons l'espoir qu'une photographie puisse le représenter, l'identifier, l'aider à cartographier son moi intérieur et extérieur.

Le poème Commander à a un ton sombre, d'amertume, malgré l'eu-lyrique acceptant et assumant le passage du temps ("Laissez cette ride, qui me donne un certain air de sagesse").

Dans la dernière strophe, on constate que, si dur que soit le passage du temps, l'eu-lyrique n'entend pas dissimuler la souffrance ou les chagrins, et veut assumer sa solitude comme il assume ses propres rides.

6. Réinvention

La vie n'est possible que

réinventée.

Le soleil se promène dans les prairies

et marche la main d'or

par les eaux, par les feuilles...

Ah ! toutes les bulles

qui provient de bassins profonds

de l'illusionnisme... - rien d'autre.

Mais la vie, la vie, la vie,

la vie n'est possible que si

réinventée.

Viens la lune, viens, retire-toi

les menottes sur mes bras.

Design me for spaces

plein de votre Chiffre.

Que des mensonges !

de la lune dans la nuit noire.

Je ne peux pas te trouver, je ne peux pas t'atteindre...

Seulement - en temps équilibré,

Je descends de la balançoire

qu'au-delà du temps m'emmène.

Seul - dans l'obscurité,

fico : reçu et donné.

Parce que la vie, la vie, la vie,

la vie n'est possible que si

réinventée.

Publié dans le livre Vacancy Music (1942), le poème Réinvention Le refrain n'est pas rimé et est répété trois fois (au début, au milieu et à la fin du poème), renforçant ainsi l'idée qu'il souhaite véhiculer.

Les versets soulignent la nécessité de regarder autour de soi à partir d'une nouvelle perspective, d'expérimenter la vie d'une manière différente, de redécouvrir la couleur de la vie quotidienne.

D'un point de vue négatif, la solitude, caractéristique de la lyrique de Cecilia, apparaît également tout au long du poème ("Je ne peux pas te trouver, je ne peux pas t'atteindre..."). D'un autre côté, conscient des douleurs de la vie, le moi lyrique du poème le clôt sur un ton d'espoir, en indiquant la possibilité d'une sortie solaire.

7. La danseuse

Cette fille

si petit

veut être une ballerine.

Il ne sait ni faire ni refaire

mais sait se tenir sur la pointe des pieds.

Tu ne connais ni mi ni fá

Mais il incline son corps d'un côté et de l'autre

Il ne connaît ni l'un ni l'autre,

mais ferme les yeux et sourit.

Tourner, tourner, tourner, avec les bras en l'air

et n'a pas de vertiges ni de décalage.

Mettez une étoile et un voile dans vos cheveux

et dit qu'il est tombé du ciel.

Cette fille

si petit

veut être une ballerine.

Mais alors, oubliez toute la danse,

et veut aussi dormir comme les autres enfants.

Le poème ci-dessus est inséré dans le livre pour enfants Soit ceci, soit cela (1964). Comme les autres vers insérés dans la publication, Cecília adopte la stratégie d'utiliser des rimes marquées et une forte musicalité pour attirer les enfants. Les trois premiers vers de La danseuse sont répétés presque jusqu'à la fin du poème, ce qui donne l'idée d'un cycle.

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La production de littérature de jeunesse de Cecília cherche à rencontrer l'univers et les fantasmes des enfants. Le protagoniste de La danseuse Nous voyons en elle l'angoisse naturelle d'une enfant qui n'a qu'un rêve : danser. Le poème, en effet, semble être une sorte de chanson qui évoque la danse en raison de sa profonde musicalité.

Il convient de rappeler que tout cet univers de l'enfance était très cher à Cecília, qui fut institutrice et fonda la première bibliothèque pour enfants de Rio de Janeiro. Tout au long des essais publiés de son vivant, il est possible de constater à quel point la poétesse était préoccupée par le sort de l'éducation, en particulier dans les premières années de la vie.

8. Élégie

Ce mois-ci, les cigales chantent

et les tonnerres marchent sur la terre,

s'accrochant au soleil.

Ce mois-ci, à la tombée de l'après-midi, la pluie déferle sur les montagnes,

et la nuit s'éclaircit,

et le chant des grillons fait palpiter l'odeur humide du sol.

Mais tout est inutile,

parce que vos oreilles sont comme des coquilles vides,

et votre narine encore

plus de nouvelles

du monde qui circule dans le vent.

Les vers ci-dessus sont un extrait du long poème Élégie La Portugaise Jacinta Garcia Benevides était chargée d'élever la jeune fille après son orphelinat prématuré.

Dans les six premiers versets, nous voyons le monde en pleine activité, en pleine effervescence. Tout semble obéir à l'ordre naturel de la vie et la vie quotidienne se déroule sans heurts.

La deuxième partie du poème, quant à elle, est complètement différente des premiers vers : si au début nous avons lu la vie, maintenant nous lisons la mort, si nous avons vu la plénitude, maintenant nous voyons l'absence.

Il faut souligner que la mort ici n'est pas seulement celle de celui qui est parti, mais aussi celle du je-lyrique, qui voit un morceau de lui-même devenir creux, vide, en contrepoint du monde plein de vie qui l'entoure.

9. Les filles

Arabela

a ouvert la fenêtre.

Caroline

Je lèverais le rideau.

Et Marie

il regardait et souriait :

"Bonjour !

Arabela

a toujours été la plus belle.

La Caroline,

la fille la plus sage.

Et Marie

Souriez :

"Bonjour !

Nous penserons à toutes les petites filles

qui vivait dans cette fenêtre ;

une personne appelée Arabela,

qui s'appelait Carolina.

Mais le désir profond

c'est Mary, Mary, Mary,

qui a dit d'une voix amicale :

"Bonjour !

Le célèbre poème Les filles appartient au livre pour enfants Soit ceci, soit cela (Nous y voyons une nouvelle pleine de musicalité, une façon de construire les vers qui suggère presque une chanson au lecteur.

Le format choisi n'est d'ailleurs pas gratuit : les vers rimés et la répétition facilitent la mémorisation et séduisent les enfants pour qu'ils lisent et relisent le poème encore et encore.

L'histoire des trois filles - Arabela, Carolina et Maria -, chacune avec ses caractéristiques propres, est basée sur des actions et est relativement simple mais extrêmement visuelle. En faisant appel à des images quotidiennes, Cecília parvient à rapprocher l'univers poétique de la réalité du petit lecteur.

Les filles - Cecília Meireles

10. Interlude

Les mots sont trop longs à prononcer

et le monde très réfléchi.

Je me tiendrai à côté de vous.

Ne me dites pas qu'il y a un avenir

ni passé.

Quitte le présent - mur clair

sans écrits.

Ne parlez pas,

Ne m'expliquez pas le présent,

parce que c'est trop.

Dans les eaux de l'éternité,

la comète de mes malheurs

s'enfonce, déchiquetée.

Je me tiendrai à côté de vous.

Interlude Il s'agit avant tout d'un poème qui parle d'un abandon du corps et de l'âme, dans lequel le parolier souligne la nécessité de vivre et de ressentir le moment présent - l'ici et le maintenant - sans se réfugier dans le passé ni se perdre dans les perspectives d'avenir.

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Le titre du poème ( Interlude Le mot interlude désigne également un passage musical qui interrompt deux scènes (ou deux actes) dans une pièce de théâtre. Ce sens ne doit pas être écarté car la poétique de Cecília est pleine de musique.

Remarquez dans le poème que le troisième vers se répète et est le dernier à conclure l'écriture, symbolisant la certitude du moi lyrique. Malgré les excès du monde (les innombrables mots et hypothèses, comme nous l'avons mentionné), le sujet poétique souligne ce dont il a l'entière sécurité : le désir d'être aux côtés de l'être aimé.

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    Patrick Gray
    Patrick Gray
    Patrick Gray est un écrivain, chercheur et entrepreneur passionné par l'exploration de l'intersection de la créativité, de l'innovation et du potentiel humain. En tant qu'auteur du blog "Culture of Geniuses", il s'efforce de percer les secrets d'équipes et d'individus performants qui ont obtenu des succès remarquables dans divers domaines. Patrick a également cofondé une société de conseil qui aide les organisations à développer des stratégies innovantes et à favoriser les cultures créatives. Son travail a été présenté dans de nombreuses publications, notamment Forbes, Fast Company et Entrepreneur. Avec une formation en psychologie et en affaires, Patrick apporte une perspective unique à son écriture, mélangeant des idées scientifiques avec des conseils pratiques pour les lecteurs qui souhaitent libérer leur propre potentiel et créer un monde plus innovant.